Parce que si les codes se limitaient à « Bonjour, au revoir », tout le monde pourrait habiter là. Or, ce n’est pas si simple. Suivez le guide…

 

  1. Conservez toujours une fenêtre Wikipédia ouverte sur votre iPhone. Un dîner improvisé ? Un cocktail imprévu ? Un nouveau voisin qui emménage ? Malheureux, ne vous précipitez pas pour papoter avec le premier venu comme s’il vivait hors arrondissement. S’il est là, dans ce périmètre, c’est qu’il a forcément quelque chose en plus. Une startup en progression. Un oncle ministre. Une exposition en cours au Moma ou des compétences en lutte antiterroriste que vous ne voulez pas découvrir le lendemain sur le plateau de BFM TV. Renseignez-vous bon sang. Googlisez ! Tout le monde gagnera du temps.
  2. Libérez vos jeudis soirs. Certes, on tolérera que vous soyez pris parfois ce jour là, mais pas toujours, au risque de vous désociabiliser. Car jeudi, vous êtes de vernissage. Toutes les galeries de l’arrondissement proposent des « coupettes » autour d’un nouvel artiste. Restez couleur locale, pensez à prendre la pose. Toutes les fantaisies sont permises pour vous fondre dans la masse. Plongez une aspirine dans votre champagne par exemple. À celui qui demande pourquoi, répondez : « parce que les bulles me donnent mal à la tête ». Soyez une installation à vous tout seul. On vous trouvera follement arty. Si Sophie Calle vous envoie un bristol, considérez que vous maîtrisez à point les usages.
  3. Montrez-vous aux prix littéraires. C’est un minimum. Prouvez que vous savez conserver la culture et la profondeur qui font le sel du sol germanopratin. Lâchez quelques citations de Houellebecq pour brocarder les écrivaillons qui papillonnent, mais n’oubliez pas de les embrasser. Prenez Simon Liberati et Eva Ionesco dans vos bras comme s’ils étaient de la famille. Faites dire que Frédéric Beigbeder est has been mais demandez-lui un autographe par courtoisie, pour ménager son égo. Restez bon esprit. Oubliez volontiers qu’en dessous de 30 000 exemplaires, l’écrivain est au RSA. Et cachez votre ISF ou votre poste d’associé dans un cabinet d’avocats d’affaires spécialisé en LBO (Leverage Buy Out). Personne ne veut s’ennuyer à vos côtés. Faites croire que vous écrivez des nouvelles, la nuit, vers 3 h 30 du matin, et planquez-moi cette Rolex à fond vert en édition limitée, c’est embarrassant.
  4. Vous croisez une célébrité ? Restez digne. Il y en plein le quartier, ce ne sera pas votre dernier people à saluer. Ne vous laissez pas éblouir, faites à la star le plaisir de garder une lueur d’intelligence, ça la changera. N’est-ce pas Kissinger qui disait « Ce qu’il y a de bien quand on est célèbre, c’est que si vous ennuyez les gens, ils croient que c’est de leur faute ». Gardez votre naturel, n’hésitez pas à écourter la conversation. Traitez d’égal à égal. Vous n’en serez que plus apprécié. Et bannissez les selfies. Une envie trop grande d’immortaliser la rencontre ? Inventez le « dolfie » : la star, mais photographiée de dos avec vous devant. Nadine de Rothschild vous en remerciera.

Anaïs Ferrand