Le Panthéon n’a pas toujours servi de dernière demeure pour les VIP de la République. Et si le célébrissime monument, qui rayonne sur la Rive Gauche, n’était pas ce que vous croyez ?
Vœu pieux
Et non, le Panthéon n’a pas toujours servi de dernière demeure pour les VIP de la République ! Tout au contraire, ce temple de la laïcité fut d’abord… une église. En août 1744, le roi Louis XV tombe gravement malade. Obsédé par le salut de l’âme royale, les dévots religieux de la Cour réclament aussitôt le départ de la favorite du roi, Madame de Châteauroux. Mais si le roi fait mine d’écarter la pécheresse, il fait surtout le serment de construire une nouvelle église à Paris : ce sera le futur Panthéon. Aussitôt rétabli, il pose la première pierre de l’édifice et son vœu accompli… rappelle sa belle maîtresse.
Un transfert tumultueux
Le 26 mars 2002, le président de la République, Jacques Chirac, signe le décret de transfert des cendres d’Alexandre Dumas. Un hommage mérité pour cet écrivain, dont les romans réconcilièrent les Français avec leur Histoire. Mais, à Villers-Cotterêts où repose le père des Trois Mousquetaires, certains ne l’entendent pas ainsi : hors de question de se laisser dépouiller de l’enfant du pays. Protestations enflammées, veillées d’armes, menaces d’enlèvement du cercueil… Finalement tout s’apaise et le 30 novembre 2002, Alexandre Dumas rejoint le Panthéon, juste à côté de Victor Hugo, le meilleur ami de sa jeunesse. Les deux héros du Romantisme sont enfin réunis.
Postérité variable
Aux grands hommes la patrie reconnaissante ! Telle est la devise du Panthéon qui, depuis 1792, accueille l’élite de la République. Mais la gloire publique est parfois capricieuse et certaines personnalités, enterrées en grande pompe dans ce temple national, en sont sorties plus vite que prévu. Ce fut le cas du tribun Mirabeau, que Paris entier pleura, jusqu’à ce que l’on s’aperçoive que le Grand Homme avait une fâcheuse tendance à la corruption. Exit Mirabeau. Il en fut de même pour le révolutionnaire Marat, dont la dépouille fut promptement éjectée du Panthéon. Quant au fossoyeur, ne sachant qu’en faire, il l’a discrètement jetée aux égouts.
L’heure, c’est l’heure
Qui sait que le dôme du Panthéon abrite une magnifique horloge Wagner du XIXe siècle ? Un employé qui, dans les années 60, lassé de devoir monter les interminables marches pour remonter l’horloge, décida d’en briser le mécanisme. Un sabotage qui n’inquiéta pas plus que ça l’Administration jusqu’en 2005, où un groupe de jeunes gens, amateurs de patrimoine délaissé, décida de restaurer l’horloge historique. Pendant un an, à la barbe des gardiens et de la police, ces passionnés passèrent leur temps libre nocturne à réhabiliter clandestinement la belle endormie. Un succès, puisque les aiguilles de la vieille horloge se remirent un beau matin à tourner. Ayant découvert le pot aux roses, l’Administration ne se montra pas sous son meilleur jour : vexée, elle fit démonter l’horloge !
Vengeance posthume
Après plus de dix ans de Révolution, près de quinze ans d’Empire, le roi Louis XVIII, en 1815, prend possession de la France. Aussitôt, prêtres exilés, nobles frustrés et réactionnaires en colère réclament des mesures fortes, pour purger le royaume des pernicieuses idées démocratiques. Ainsi, pourquoi ne pas virer l’encombrant Voltaire du Panthéon, que l’on vient justement de reconvertir en église ? Réponse subtile de Louis XVIII, qui connaissait la valeur des symboles : « Laissez-le donc, il est bien assez puni d’avoir à entendre la messe tous les jours ».
Être ou ne pas y être
Le nombre de candidats à la panthéonisation ne connaît pas la crise. Ainsi, depuis 1792, on parle d’y faire entrer le philosophe Descartes. Si le père de la Méthode a, sans aucun doute, toute sa place entre Rousseau et Marie Curie, il y a néanmoins un hic : le squelette de Descartes a disparu ! Il ne reste que son crâne au musée de l’Homme. Un crâne qui attire et attise des convoitises. Un premier Ministre, en particulier, l’aurait bien vu dans son fief électoral, la Sarthe, où Descartes est né : il s’agit de François Fillon.
Jean Acacio